Contre le covoiturage sanitaire, les taxi se mobilisent en France

Contre le covoiturage sanitaire, les taxi se mobilisent en France
09 Janv. 2024

Des milliers de chauffeurs de taxi ont organisé des manifestations à travers la France lundi pour protester contre une nouvelle disposition de la loi de finances de la Sécurité sociale. Cette mesure vise à mutualiser les déplacements des patients nécessitant une assistance médicale. Rachid Boudjema, président de l’Union nationale des taxis (UNT), a annoncé que les chauffeurs étaient conviés à discuter des détails d’application de cette mesure au ministère de la Santé le 12 janvier.

À l’initiative de l’UNT, les chauffeurs ont perturbé la circulation sur les grands axes de villes telles que Paris, Marseille, Toulouse, Lille et Bordeaux. En Île-de-France, ils ont ralenti la circulation sur l’A1 le matin avant de converger vers le ministère de la Santé à Paris. La contestation porte sur un article du projet de loi de finances de la Sécurité sociale pour 2024, adopté de force au Parlement le 4 décembre.

Le gouvernement cherche à inciter les patients à opter pour une offre de transport sanitaire partagée avec d’autres patients, utilisant des véhicules sanitaires légers ou des taxis conventionnés via une plateforme en ligne. Rachid Boudjema a souligné la nécessité de ne stigmatiser ni les malades ni les transporteurs, ajoutant que le transport partagé est déjà une pratique courante, mais il est essentiel que les patients l’acceptent sans désagrément ni attente excessive.

À Toulouse, environ 350 taxis ont également manifesté, perturbant la circulation autour de l’aéroport de Blagnac, où le président Emmanuel Macron était en déplacement dans l’après-midi.

 

Plateformes

Les déplacements en ambulance ou en taxi sont admissibles au remboursement s’ils sont associés à une hospitalisation, à une affection de longue durée, à un accident du travail, ou s’ils englobent un trajet de plus de 150 kilomètres. En 2022, ces services de transport ont généré des remboursements d’environ 5,5 milliards d’euros, avec un total de 65 millions de trajets effectués au cours de l’année, se limitant aux seuls taxis et aux véhicules sanitaires légers (VSL), selon les rédacteurs de la législation.

L’objectif est de réduire les coûts pour la Sécurité sociale de 100 millions d’euros par an entre 2025 et 2027, tout en contribuant à atténuer la pollution. Actuellement, près de 15% des trajets sont partagés, avec des incitations pour encourager la collaboration des transporteurs. Cependant, le refus des patients demeure un défi significatif.

En l’absence de justification médicale pour ce refus, les patients ne bénéficient plus du tiers payant et doivent avancer les frais. Le remboursement se fera ensuite sur la base du tarif d’un transport partagé. Selon le gouvernement, cette mesure n’a qu’un impact limité sur les patients, car elle s’applique uniquement aux transports planifiés, lorsque le partage est possible et autorisé par le médecin, notamment pour les déplacements liés à des séances de dialyse ou de rééducation.

 

Du bétail

Dans les zones rurales, le transport médical représente une part significative, pouvant atteindre jusqu’à 90% du chiffre d’affaires des professionnels, selon la Fédération des artisans du taxi. L’Union nationale des taxis (UNT) est d’avis que le transport partagé n’affecte pas le chiffre d’affaires des taxis, mais elle souhaite exclure du dispositif les plateformes facilitant la mise en relation entre hôpitaux et transporteurs, comme pour les médecins ou les VTC, s’adjugeant une part du marché.

Kamel Belaz, taxi à Paris, critique cette approche, soulignant qu’au prétexte d’économies, l’attention n’est pas portée sur le patient, traité presque comme du bétail. Sergio Valleret, à Bordeaux, déplore la perte du caractère médical des « navettes médicalisées ».

Emmanuelle Cordier de la Fédération nationale du taxi (FNDT) souligne l’impossibilité de faire attendre les clients en fin de consultation, ajoutant que la désertification médicale et les regroupements de structures de soins augmentent les kilomètres parcourus, contrairement aux affirmations de l’État.

En prévision de la renégociation de la convention des taxis avec l’Assurance maladie en 2024, la FNDT n’a pas appelé à la manifestation immédiate, mais n’exclut pas une mobilisation future.